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COP30 : dix ans après Paris, quels résultats ?
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November 14, 2025

Dix ans après l’Accord de Paris, la trajectoire mondiale semble s’orienter vers un réchauffement de +2,8°C d’ici la fin du siècle, si les politiques actuelles ne sont pas renforcées en termes d’engagements climatiques. Pourtant, la prise de conscience collective face aux enjeux climatiques est globalement affirmée, appelant à la nécessité de transformer nos modes de consommation, de production et de mobilité vers des solutions à plus faible empreinte carbone.

Le changement climatique n’est plus une hypothèse scientifique ni une menace lointaine : il est désormais une réalité tangible. Ces dernières années ont vu se multiplier les phénomènes climatiques extrêmes, tels que les vagues de chaleur records, les inondations dévastatrices, ou les sécheresses prolongées qui frappent toutes les régions du globe avec une intensité et une fréquence croissantes.

Cette tendance se manifeste de manière encore plus marquée à l’échelle du continent africain. En effet, selon l’Organisation mondiale de la météorologie (OMM), l’Afrique s’est réchauffée au cours des soixante dernières années à un rythme supérieur à la moyenne mondiale. L’année 2024 a d’ailleurs été la plus chaude sur le continent, elle a été marquée par le déplacement d’environ 7,8 millions de personnes en raison de catastrophes naturelles dans la région subsaharienne, selon le Centre de surveillance des déplacements internes.

Face à un enjeu mondial d’une telle ampleur, et malgré une prise de conscience collective désormais largement partagée, la réponse internationale reste fragmentée, timide et hésitante. En 2025, et pour la première fois, les États-Unis, la première puissance économique mondiale et le deuxième pays émetteur de gaz à effet de serre, n’ont pas été représentés par une délégation officielle à la Conférence des Parties (COP30). Ce choix interroge : relève-t-il d’un pragmatisme stratégique ou traduit-il un désengagement, provisoire ou durable ? Dans un tel contexte, la question de la gouvernance mondiale du climat apparait plus que jamais comme un enjeu central. L’absence de leadership fort ne risque-t-elle pas de fragiliser la dynamique collective ?

Au fil des années, la COP est devenue un rendez-vous planétaire qui, malheureusement, met en évidence notre incapacité à inverser les tendances, à transformer en profondeur nos modes de vie et nos systèmes polluants, et à agir de manière décisive dans l’intérêt de notre avenir commun ainsi que celui des générations à venir. Elle est également le théâtre des annonces financières rarement suivies d’effets concrets. Des milliards sont promis, des fonds sont créés, mais la mobilisation réelle demeure dérisoire. Le Fonds pour les pertes et préjudices, créé pour soutenir financièrement les pays vulnérables les plus touchés par les effets du changement climatique, et salué en 2023 comme une avancée diplomatique majeure après avoir recueilli les signatures de 198 pays, n’a, à ce jour, reçu que 397,74 millions de dollars.

Le principe de solidarité, reconnu et régulièrement réaffirmé par les instances internationales, consacre la responsabilité particulière des pays développés dans le soutien aux efforts d’adaptation menés par les pays les plus vulnérables. Ce principe, au cœur de la gouvernance climatique mondiale, demeure essentiel à la mise en œuvre effective d’une transition juste et équitable. Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a récemment rappelé la nécessité de renforcer cette solidarité internationale, en soulignant que la lutte contre le changement climatique ne saurait être menée sans un engagement collectif renouvelé. 

Dans le même sens, dans son avis rendu le 23 juillet 2025, la Cour Internationale de Justice (CIJ) rappelle que la coopération internationale en matière climatique implique une obligation juridique pour les États, en vue d’apporter une assistance financière et technique aux pays en développement, conformément à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et à l’Accord de Paris. Dans cette perspective, plusieurs propositions de mécanismes de financement, voire fiscaux, pourraient être examinées, même s’il semble difficile qu’il y ait des négociations avancées dans ce sens lors de cette COP.

Par ailleurs, 74 pays représentant environ 63 % des émissions mondiales ont désormais soumis leurs contributions déterminées au niveau national (CDN). Leurs plans climatiques actuels ne conduiraient, du moins à ce stade, qu’à une baisse globale estimée à 5,5 % des émissions d’ici 2035 par rapport à 2022, soit bien en deçà des 30 % nécessaires pour espérer atteindre la neutralité carbone à la moitié du siècle.

La COP30 porte l’ambition de transformer les engagements de l’Accord de Paris en actions concrètes. Trois priorités se dégagent : renforcer la mise en œuvre des politiques nationales pour maintenir le réchauffement sous 1,5 °C, accélérer la transition juste vers les énergies renouvelables tout en protégeant les forêts et la biodiversité, et consolider les mécanismes de financement au profit des pays les plus vulnérables. La présidence brésilienne entend également replacer les populations au cœur de l’action climatique, en reliant la lutte contre le changement climatique aux enjeux de justice sociale, de développement équitable et de cohésion territoriale.

En coïncidant avec la fin d’un cycle de dix années depuis l’Accord de Paris, la COP30 intervient à un moment charnière : après une décennie d’engagements et d’annonces, nous sommes censés entrer dans une phase d’implémentation réelle, avec des solutions techniquement viables et financièrement soutenables, susceptibles d’inverser une trajectoire climatique de plus en plus préoccupante. 

Il y a lieu de reconnaitre quelques avancées qui sont en cours de réalisation. Entre 2015 et 2025, la part des énergies fossiles dans le mix électrique mondial a baissé de 81% à 58%. Les investissements dans les installations de production des énergies renouvelables dépassent ceux dans les énergies fossiles. Le rapport de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) révèle qu'en 2024, 2.000 milliards de dollars ont été investis dans les énergies vertes, soit deux fois plus que dans les combustibles fossiles. Par ailleurs, et pour la première fois, la Chine inscrit dans ses objectifs climatiques une réduction absolue de ses émissions de gaz à effet de serre de 7 à 10 % d’ici 2035, par rapport à son pic. Cet engagement, bien que modeste au regard des exigences de l’Accord de Paris, marque un tournant symbolique dans la politique climatique du pays.

Sans remettre en cause l’importance cruciale de l’action multilatérale face à un enjeu planétaire aussi majeur, la COP se trouve à la croisée des chemins. Entre le manque d’engagement réel de grandes puissances, souvent dicté par des intérêts économiques et des considérations politiques, et l’absence de mécanismes opérationnels véritablement efficaces pour répondre aux besoins spécifiques et urgents des pays les plus vulnérables, la Conférence des parties doit impérativement se réinventer. Sans une évolution tangible vers des résultats concrets, la COP risque de se réduire à un exercice diplomatique ritualisé, déconnecté des réalités climatiques, mobilisant efforts, ressources et énergies pour un faible retour sur investissement.

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