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La résolution 2703 du Conseil de sécurité : on reprend la même et on recommence
November 11, 2023

L’adoption par le Conseil de sécurité de l’Onu, le 27 octobre 2023, de la résolution 2703 (2023) sur la question du Sahara marocain, est intervenue dans un contexte régional marqué par la persistance de la tension entre le Maroc et l’Algérie et la poursuite par le polisario des violations du cessez-le-feu qui ont enregistré une escalade sans précédent, dans la nuit du 28 au 29 octobre, par le ciblage de la ville de Smara, faisant des victimes. L’adoption de cette nouvelle résolution intervient aussi dans un environnement international absorbé par les événements tragiques dans la bande de Gaza qui ont éclipsé la guerre en Ukraine. Ce double contexte a amené le Conseil à reconduire la même résolution, malgré les tentatives des délégations russe et mozambicaine d’introduire des amendements visant à écarter la référence au compromis, au réalisme et au pragmatisme et à inclure une composante de surveillance des droits de l'homme dans le mandat de la Minurso. Ainsi, le nouveau texte confirme la prééminence de la proposition d’autonomie marocaine, les qualificatifs de la solution politique de compromis, le nécessaire recensement des populations de Tindouf et l'utilité des tables rondes pour relancer le processus de négociation.

Introduction

Le Conseil de sécurité a adopté, le 27 octobre 2023, par 13 voix pour et 2 abstentions (Fédération de Russie et Mozambique) la résolution 2703 sur la question du Sahara marocain,  par laquelle il a prorogé le mandat de la Minurso jusqu'au 31 octobre 2024.

Cette adoption est intervenue dans un contexte régional marqué par la persistance d’une tension exacerbée dans les relations entre le Maroc et l’Algérie et la poursuite par le polisario des violations du cessez-le-feu dûment constatées et dénoncées, encore une fois, par le Secrétaire général et le Conseil de sécurité. Ces violations ont enregistré une escalade sans précédent, dans la nuit du 28 au 29 octobre, qui risque de faire glisser la région vers une situation qui menacerait la paix et la sécurité de ses peuples. En effet, à la veille de l’adoption de la nouvelle résolution par le Conseil, le polisario a pour la première fois ciblé par des roquettes la ville de Smara causant la mort d’une personne et blessant gravement deux autres.

L’adoption de cette nouvelle résolution intervient aussi dans un environnement international absorbé par les événements tragiques dans la bande de Gaza qui, en l’espace de quelques jours, a éclipsé l'épreuve de force qui se prolonge en Ukraine entre l’Occident et la Russie.

Ce double contexte a amené le Conseil a reconduire la même résolution en raison de l’absence de toute avancée dans le processus politique, dûe à la fois à l'attachement du Maroc à l'autonomie comme cadre unique et incontournable de négociation  pour clôturer le dossier sur le plan international et au rejet par l'Algérie et par le polisario de toute solution qui ne satisfait pas le droit à l'autodétermination.  

 Le processus politique, une impasse qui persiste   

Depuis la démission de M. Horst  Kohler comme Envoyé personnel - auquel on doit en décembre 2018 et mars 2019, la tenue des tables rondes qui ont permis de réunir pour la première fois depuis 2012 les quatre parties prenantes à ce différend- le processus politique se trouve dans une impasse qui se prolonge sans perspective de relance.

L’ancien Envoyé personnel Horst kohler a justifié le recours aux tables rondes par la nécessité d’encourager les quatre parties prenantes à s'engager dans la relance du processus de négociation après six années d’interruption , sans préjudice pour les prétentions de l'Algérie et du polisario quant à leur véritable statut et responsabilité dans le règlement définitif de ce différend.

Or, depuis deux années, l'Algérie  a notifié le 12 octobre 2021 au Conseil de sécurité son “ rejet formel et irréversible de ce format dit de table ronde devenu contre-productif “, accusant le Maroc “d’instrumentaliser ce format pour s’opposer à la décolonisation du Sahara

( Déclaration De M.Amar Belani, Envoyé spécial  algérien chargé de la question du Sahara occidental et des pays du Maghreb ). Elle a été suivie, en toute logique, le 30 novembre 2021, par le polisario qui réclame, à la place de ce cadre flexible, des négociations directes et exclusivement bilatérales avec le Maroc sous l'égide de l'Union africaine.

Malgré leur formulation solennelle et catégorique, ces contestations et ce refus n’ont pas trouvé d'écho ni dans le rapport du Secrétaire général du 2 octobre (Document S/2023/729) ni dans la résolution 2073 du 30 octobre 2023. Toutefois, le refus de l'Algérie et du polisario de participer de nouveau à ces rencontres, a obligé le nouvel Envoyé personnel Staffan De Mistura à essayer des pourparlers séparés et des rencontres bilatérales dans les Capitales ou à New York pour meubler son rapport au Conseil de sécurité et tenter d’amorcer une dynamique de reprise. 

C’est ainsi qu’en application de la résolution 2654 (2022), l'Envoyé personnel du Secrétaire général a entrepris plusieurs formes d’interaction avec les parties pour tenter de relancer le processus de négociation et a essayé de mobiliser dans le même sens les membres du Groupe des Amis du Secrétaire général pour le Sahara.  Les positions communiquées par les quatre parties au Secrétaire général et consignées dans le rapport de ce dernier au Conseil n’augurent pas d’un retour au processus de  négociation.

Le rapport du Secrétaire général, un constat d’impuissance

Dans son rapport de 2023, le Secrétaire générala confirmé  implicitement  la valeur et  l'utilité des tables rondes  “en engageant toutes les parties concernées à aborder la facilitation du processus par mon envoyé personnel dans un esprit d’ouverture et à s’abstenir de poser des conditions préalables au processus politique. Pour orienter la ligne de conduite actuelle et future, il convient de tenir dûment compte des précédents établis par mes anciens envoyés personnels dans le cadre des résolutions existantes du Conseil de sécurité”(par.91).

Il a, en outre, dénoncé les tensions provoquées par le polisario le long du mur de défense ainsi que “les entraves à la liberté de mouvement” de la Minurso, sans aller jusqu'à lui faire endosser la responsabilité de la rupture unilatérale du cessez-le-feu et de la dégradation de la situation dans la zone tampon.

 Concernant la tension entretenue par l'Algérie avec le Maroc, le Secrétaire général a exprimé de nouveau sa “préoccupation quant à leur détérioration ” et “encourage les deux pays à rétablir le dialogue afin de réparer leurs liens et  renouveler les efforts en vue d’une coopération régionale, notamment pour créer un environnement propice à la paix et à la sécurité.” Le Secrétaire général a, à cet égard, “noté avec soulagement les assurances données, en particulier à Alger et à Rabat, quant à l’absence d’intention d’aboutir à une escalade militaire”(par.93).

Le rapport a rendu compte de la visite de l’Envoyé personnel du Secrétaire général  au Sahara, du 5 au 7  septembre au cours de laquelle M.Staffan De Mistura a visité plusieurs projets d'infrastructures, y compris le site  du port Dakhla Atlantique en construction et tenu des réunions avec  les représentants des commissions régionales des droits de l'Homme opérant à Dakhla et Laâyoune et les élus locaux, qui lui ont exprimé leur soutien à la proposition marocaine d’autonomie et leur appui aux efforts de l’ONU pour mettre fin aux souffrances de leurs familles et proches dans les camps de Tindouf en Algérie. Ces inquiétudes ont été relayées par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2703.

En somme, un rapport factuel et descriptif qui évite d’imputer la responsabilité de la rupture du cessez-le-feu, qui dresse de manière uniforme la situation des droits de l’Homme des populations qui vivent de part et d’autre du mur, tout en insistant sur “la nécessité d’une surveillance indépendante, impartiale, globale et régulière de la situation des droits humains pour assurer la protection de tous les habitants du Sahara “.  Concernant la situation des populations des camps de Tindouf, le rapport continue de marginaliser la question du recensement,  en évitant d’exposer l'Algérie pour son refus d’autoriser le Haut Commissariat aux réfugiés à faire le comptage des vrais Sahraouis.

La préparation et le vote de la résolution

Le 20 octobre 2023, la délégation américaine, habituellement chargée de la préparation du projet de résolution sur la question du Sahara, a fait circuler une première version  et organisé un premier round de négociations le 24 octobre suivant. Le projet reprenait l’essentiel de la résolution 2654 (2022) en y ajoutant des éléments factuels et non controversés  destinés à mettre à jour la résolution. Toutefois, si la majorité des membres du Conseil ont appuyé le projet tel quel, le Mozambique et la Russie ont estimé que le projet présenté était déséquilibré et ont soumis au rédacteur américain conjointement ou séparément des amendements pour  :

- que le projet de résolution inclue une référence plus large aux contributions de tous les envoyés personnels précédents, au lieu de singulariser M. Horst Köhler, donnant ainsi l’impression de favoriser le format de table ronde qu’il avait promu;

- qu’il distingue plus clairement le Maroc et le Front Polisario des pays voisins concernés, à savoir l'Algérie et la Mauritanie;

- qu’il incorpore un nouveau libellé soulignant la nécessité de permettre au peuple sahraoui d'exercer son droit à l'autodétermination par l'organisation d'un référendum;

- qu’il se limite à qualifier la solution politique de solution négociée et mutuellement acceptable et à écarter la référence au compromis, au réalisme et au pragmatisme, et 

- qu’il prévoie une composante de surveillance des droits de l'homme pour un suivi étroit de la situation des droits de l'homme sur le territoire du Sahara.

Après deux rounds de négociations à l'intérieur du “Groupe des amis” et avec le reste des membres du Conseil, la délégation américaine qui souhaitait reconduire le même texte que celui de 2022, sans y apporter de modifications substantielles, a décidé de passer outre les propositions des deux délégations et a placé le projet inchangé sous procédure silencieuse  le 25 octobre avec l’intention de le faire voter le lendemain. Malgré la rupture par la Russie de la procédure silencieuse, la délégation américaine a maintenu sa décision de le faire voter sans incorporer aucun des amendements présentés.

La résolution 2703 : une solution politique aux paramètres inaltérables

Si l’on exclut les paragraphes 5 et 12 du Préambule, du reste non conséquents, la résolution est une reproduction fidèle de celle de 2022. Cette reprise peut s’expliquer par l’absence de progrès dans les efforts de M. De Mistura mais aussi par l’absorption  de l’attention du Conseil et de la Communauté internationale par les événements de Gaza.

L’examen du texte de la nouvelle résolution permet de relever qu’il a apporté une nette confirmation de l'identité des parties prenantes, y compris l'Algérie, de la finalité et du cadre de la solution politique et du chemin à emprunter pour y parvenir. L'Algérie est directement et expressément interpellée par le Conseil de sécurité qui lui demande de nouveau  “de participer davantage au processus politique et de progresser sur la voie d’une solution politique. La même résolution insiste sur  la nécessité pour les parties de faire preuve de volonté politique pour “parvenir à une solution politique réaliste, pragmatique, durable et mutuellement acceptable à la question du Sahara occidental, qui repose sur le compromis”. Cette référence est soulignée à maintes reprises dans la résolution 2703.Il s’agit là des contours d’une solution que le Conseil de sécurité considère la plus à même de “contribuer à la stabilité et à la sécurité dans la région du Sahel, ce qui créerait des emplois et favoriserait la croissance ainsi que des possibilités pour tous les habitants de la région”. Enfin, l’initiative d'autonomie garde sa prééminence et sa pertinence en tant que seule proposition qui satisfait les paramètres   identifiés par le Conseil pour une solution politique de compromis.

Pour ce qui est des tables rondes, le Conseil s’est félicité de l’élan impulsé par les deux séries de tables rondes de décembre 2018 et de mars 2019  et du fait que les quatre parties se soient engagées, d’une manière sérieuse et respectueuse, dans le processus politique initié par l’ONU afin de trouver des terrains d’entente. Il a aussi rappelé les contributions importantes de l’ancien Envoyé personnel dans la conduite du processus des tables rondes, et s’est félicité également de la convocation, par l’actuel Envoyé personnel, de consultations avec le Maroc, et l'Algérie, la Mauritanie et le polisario, ainsi qu’avec l’Espagne, les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, la France et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord au siège de l’ONU du 27 au 31 mars 2023. Il a, par ailleurs, apporté  “son plein soutien à Staffan De Mistura, l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, et à ses efforts pour faire avancer le processus politique, sur la base des progrès accomplis par l’ancien Envoyé personnel et conformément aux précédents pertinents”  Par ce rappel, le Conseil veut réaffirmer la valeur que revêt ce mode d’interaction dans la création d’une dynamique qui profiterait  à sa médiation et aiderait les parties à avancer vers une  solution politique mutuellement acceptable. 

Dans cette nouvelle résolution, le Conseil maintient une formulation discrète sur une question primordiale, celle du recensement des “réfugiés” de Tindouf. Cette exigence conventionnelle, dont l’accomplissement  permettrait de révéler, enfin, la taille et l'identité réelle des populations des camps,  reste impunément obstruée par l'Algérie sans que le Conseil la traite de manière volontariste et conséquente. En traitant cette question  dans le Préambule sans lui donner un caractère opérationnel par l’inclusion d’un paragraphe dans le dispositif, qui lui donnerait un effet tangible et mettrait la pression sur l'Algérie, le Conseil perpétue un statu quo insoutenable pour les “réfugiés” et leurs familles.

Après sa soumission au vote le 30 octobre, la résolution a reçu 13 voix pour, aucune  contre et deux abstentions, celles de la Russie et du Mozambique. Il sied de rappeler que depuis 2018, la résolution sur le Sahara n’est plus unanime mais à aucun moment elle n’a fait l’objet d’un veto de la part de l’un des membres permanents ou d’un vote négatif d’un membre non permanent. En effet, depuis six années, la résolution a fait l’objet d’une abstention systématique de la part de la Fédération de Russie et à deux reprises de la part de la Chine. Quant aux membres non permanents, l'abstention a été pratiquée par la Bolivie (2018), l’Éthiopie (deux fois en 2018), l’Afrique du Sud (3 fois en 2019-2020, la première année ayant donné lieu à l'adoption de deux résolutions), la Tunisie (2021), et le Kenya (2022).

Les explications de vote sur la résolution :

La France: le changement dans la continuité

 L’attitude et la position de ce pays était scrutée de très près et l’opinion publique et les observateurs  attendaient un signal de Paris qui conforterait le début d’un dégel dans les rapports entre le Royaume et l’hexagone, surtout au vu des récents développements dans les relations bilatérales illustrés par l'accréditation tant attendue des Ambassadeurs des deux pays et le déplacement, le 3 octobre 2023, d’une délégation française de haut niveau, composée d’attachés militaires et de diplomates français, à Laâyoune, chef lieu du Sahara.

L’Ambassadeur français  a rappelé “le soutien historique, clair et constant de la France au plan d’autonomie marocain. Ce plan est sur la table depuis 2007. Il est temps désormais d’avancer. Dans cette perspective, la France encourage toutes les parties à s’engager en vue d’une solution pragmatique, réaliste, durable et fondée sur le compromis et soutient les efforts de l’Envoyé personnel en vue de la reprise des tables rondes”.

C’est un fait que la France a été parmi les premiers membres du Conseil à appuyer l’initiative d’autonomie dès sa présentation et, depuis lors, cet appui a été confirmé presque chaque année. L’appel fait par la France pour avancer sur cette même initiative représente un petit pas significatif dans la bonne direction à condition qu’il soit suivi d’effet. La déclaration faite à la Radio 2M le 13 novembre 2023 par L’Ambassadeur de France au Maroc, Christophe Lecourtier, semble aller dans le même sens. En effet, en se référant au Plan d’autonomie, le diplomate français a déclaré “ nous nous inscrivons dans la dynamique du Maroc ; on va accompagner le Maroc, autant que faire se peut par un dialogue constant qui s’est réanimé pour que  ce plan puisse être partagé le plus possible à l'échelle internationale. C’est la réaffirmation que nous serons un allié fidèle, créatif, dynamique de ce que le Maroc entreprend et poursuit.”

L’action et l’attitude de la France dans les prochaines semaines et mois nous diront si ces déclarations seront suivies d’effet tant au niveau des instances européennes que l'année prochaine devant le Conseil de sécurité qui comptera l'Algérie parmi ses membres non permanents.    

Les États-Unis, une reconnaissance à double détente 

La Représentante permanente  américaine a regretté  que “le Conseil n’ait pas voté à l’unanimité pour le renouvellement du mandat”, en précisant qu'”une solution politique est essentielle pour promouvoir un avenir pacifique et prospère pour les  populations du Sahara” et que “les États-Unis continuent de considérer le plan marocain d’autonomie comme une proposition sérieuse, crédible et réaliste, et constitue une approche qui pourrait satisfaire ces aspirations”.

Une telle formulation de la position américaine  dans le cadre des débats du Conseil ne contredit nullement la reconnaissance actée en 2020 par l’Administration Trump dont la teneur a été réitérée sans équivoque par le porte-parole du State department le 19 juillet 2023. En effet, les deux positions sont les deux faces d’une même pièce, en ce sens que Washington a reconnu sur le plan interne la marocanité du Sahara et l’autonomie comme seul cadre de négociation tout en soutenant les efforts de l’ONU pour dégager une solution politique acceptable pour toutes les parties. Il ne s’agit pas ici d’un “double langage” mais d’une reconnaissance du fait que nonobstant le poids et l’impact de la reconnaissance américaine, la recherche de toute solution à ce différend sur le plan international requiert le consensus au sein du Conseil sous l'égide duquel les bons offices du Secrétaire général sont déployés depuis 1990.  

La Russie, une abstention intrigante 

La Russie a justifié son abstention en faisant valoir les griefs suivants :

- le fait qu' “aucune des observations fondées sur les principes et dûment étayées, y compris celles ayant trait à un compromis, que nous transmettons au rédacteur depuis plusieurs années, n’a été prise en compte .”et sa delegation de rappeler que “

- depuis 2018, les résolutions prorogeant le mandat de la MINURSO ont été modifiées d’une manière qui, à notre avis, compromet l’approche impartiale et non partisane de la problématique du Sahara occidental;

- des formulations vagues sont apparues, qui soulèvent des questions, ainsi que des formulations qui désignent les parties directement impliquées dans le processus de règlement concernant le Sahara occidental;

- les nombreuses références au format des tables rondes, qui n’est plus d’actualité et limite le travail de médiation de l’Envoyé personnel, n’ont plus lieu d’être. À cet égard, nous voudrions réaffirmer notre position constante sur le processus de règlement de la question du Sahara occidental;

- nous prônons une position équilibrée et impartiale. Nous soutenons les efforts de l’Envoyé personnel pour organiser des négociations directes entre le Maroc et le Front POLISARIO.

- La formule de règlement final doit être basée sur des solutions mutuellement acceptables qui facilitent un règlement politique juste de la situation concernant le Sahara Occidental qui convienne à la fois aux Marocains et au Front Polisario et qui prévoit l’autodétermination du peuple du Sahara Occidental dans le cadre de procédures conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies;

- notre position est uniquement le reflet du travail peu scrupuleux du rédacteur de la résolution présentée aujourd’hui. Une fois de plus, cela suscite de sérieux doutes quant à l’impartialité du travail des rédacteurs chargés de certains dossiers relatifs à des pays donnés dans l’accomplissement de leurs obligations.

Les Émirats arabes unis : un testament au nom des États du Golfe

Siégeant pour la dernière fois au Conseil et l’approche de la fin de son mandat,  le représentant des Émirats arabes unis a tenu à réitérer la position de son pays qui se résume aux   points suivants et dont la teneur se retrouve dans la position des autres membres du Conseil de Coopération du Golfe :

- le format des tables rondes, avec la participation de toutes les parties, permettra de sortir de l’impasse politique;

- l’initiative d’autonomie présentée par le Royaume du Maroc, que les résolutions du Conseil de sécurité qualifient depuis 2007 de sérieuse et crédible, est le seul moyen de parvenir à une solution politique concertée, juste, durable et pragmatique;

- hommage à  la coopération entre le Royaume du Maroc et la MINURSO, ainsi que son engagement en faveur du cessez-le-feu. Le Polisario doit coopérer pleinement avec la MINURSO, lever toutes les restrictions de nature à entraver les activités de la Mission et réaffirmer son engagement en faveur du cessez-le-feu

- les Émirats arabes unis réaffirment leur ferme appui à la souveraineté du Royaume du Maroc sur l’ensemble du Sahara marocain, et  insistent sur le fait que son intégrité territoriale ne doit pas être compromise.

Le Gabon :  le changement dans la continuité

Le représentant du Gabon a réitéré “ l’appui de son pays à l’initiative marocaine d’autonomie, qui présente des perspectives crédibles et rassurantes permettant non seulement de mettre fin à l’impasse actuelle, mais aussi de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable”. Il a encouragé le Royaume du Maroc à poursuivre ses efforts en vue de la préservation du cessez-le-feu et du renforcement de sa coopération avec la MINURSO et a “appelé toutes les autres parties à faire de même, dans l’intérêt de la sécurité et de la stabilité dans l’ensemble de la région.”  

Le Mozambique: la voix de son maître  

De par la position hégémonique de l’Afrique du sud en afrique australe et son influence sur les pays voisins qui continuent de soutenir son militantisme en faveur du polisario, les pays comme le Mozambique, le Zimbabwe et la Namibie épousent la ligne de conduite de Pretoria et servent son agenda au sein du Conseil lorsqu’ils arrivent à accéder à un siège au Conseil de sécurité.  Aussi était-il prévisible que le représentant du Mozambique exprime une position en déphasage par rapport à l'évolution du dossier. C’est ainsi qu’il a donné comme objectif à l'engagement de son pays au Conseil sur la question du Sahara celui d’”d’aider la MINURSO à revenir à ses objectifs fondamentaux, à savoir l’organisation d’un référendum pour l’autodétermination du peuple sahraoui, comme le prévoient la résolution 690 (1991) ( sous-entendu le Plan de règlement enterré par l’ONU elle même ) et qui est “ancré dans la résolution 1514 (1960) de l'assemblée générale”.

À son avis,” la résolution adoptée n’aidera pas les parties à parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptée, comme cela était prévu à l’origine. Au contraire, elle préfigure un abandon progressif du mandat et ne fait que repousser l’examen des questions fondamentales qui doivent être traitées”.

La position de la Chine : dans le sillage de la Russie mais pas trop 

Sur le fond, le représentant de la Chine a appuyé “ une solution juste et durable, acceptable pour toutes les parties, fruit de consultations entre les parties sur un pied d’égalité”. Sur la démarche, il a formulé le voeux “que les discussions au Conseil sur les prochaines résolutions relatives au mandat de la MINURSO refléteront l’évolution récente de la situation et que le rédacteur (les États-Unis) encouragera des consultations approfondies au sein du Conseil en vue de dégager un consensus plus large”.

 

Les réactions des parties prenantes à la résolution 2703  

Si le Maroc s’est félicité de l’adoption de la nouvelle résolution, l'Algérie s’est, contrairement à son habitude, abstenu de tout commentaire officiel au moment où le polisario s’est limité à “exprimer sa gratitude à tous les pays qui soutiennent le droit du peuple du Sahara occidental à l'autodétermination et au processus de décolonisation.”

Dans une déclaration publiée le 30 octobre, le Maroc a justifié son appui à la nouvelle résolution par :

1- le soutien international grandissant de près d’une centaine de pays à l’Initiative marocaine d’Autonomie, l’ouverture à Laâyoune et à Dakhla de plus d’une trentaine de consulats généraux;

2- l’identification clairement des parties au processus politique, qui doivent assumer leurs responsabilités politique, juridique, et morale dans la recherche d’une solution définitive au différend régional sur le Sahara marocain;

3- la citation de l’Algérie à six reprises, soit autant de fois que le Maroc, confirmant ainsi que l’Algérie est bel et bien la partie principale à ce différend artificiel;

4- la nouvelle résolution consacre les tables rondes comme seul cadre du processus politique, avec notamment la participation de l’Algérie, partie prenante directement interpellée;

5- confirmation par le Conseil du constat selon lequel  la solution politique définitive ne peut être qu’une « solution politique réaliste, pragmatique, durable et basée sur le compromis ». Ces paramètres sont de nouveau couplés à l’appui du Conseil de sécurité à l’Initiative marocaine d’Autonomie, qualifiée de « sérieuse et crédible »;

6- un nouveau rappel à l’ordre au « polisario » concernant ses violations et ses restrictions sur la liberté de circulation de la MINURSO;

7- le renouvellement de l’appel fait à l’Algérie de remplir ses obligations conventionnelles concernant l’enregistrement des populations des camps de Tindouf.

 

Quant à l'Algérie officielle, elle a observé un silence absolu et sa presse s’est limitée à faire état de l’adoption de la résolution. Le seul à avoir réagi à la résolution est le  le Comité national algérien de solidarité avec le peuple sahraoui (CNASPS) qui s’est dit « convaincu de la capacité de l’Union africaine (UA) à participer à la décolonisation du Sahara occidental, selon les principes du droit fondamental de l’instance continentale, insistant sur le droit du peuple sahraoui à résister par tous les moyens légitimes pour mettre fin à ses souffrances.”

  Comment expliquer ce mutisme  alors qu'auparavant l'Algérie  se prononçait soit en termes de satisfaction soit en termes de critiques ou de rejet sur toutes les résolutions précédentes? La réponse peut être trouvée dans le souci de ce pays de se présenter sous un nouveau jour à la veille de l’entame de son mandat au Conseil qui débutera le 1er janvier 2024.Pour un pays qui ambitionne de “porter la voix des pays arabes et africains et d’assurer la défense des intérêts stratégiques communs sur les différentes questions relevant des compétences du Conseil de sécurité»(Communiqué de la présidence de la République  du 6 juin 2023), critiquer une résolution élaborée, portée et soutenue par la principale puissance du Conseil serait compromettre les perspectives de coopération avec ce pays et compromettre  les chances de l'Algérie de pouvoir  jouer un rôle sur des dossiers qui lui tiennent à coeur comme le Mali, le Sahel et la question palestinienne  durant  les deux années à venir. Cette attitude pourrait faire partie d’une stratégie algérienne en deux temps consistant à calmer le jeu avec le Maroc sur le plan de la communication pour crédibiliser un rôle de coordination africaine au sein du Conseil où siègent le Mozambique et la Sierra leone et, dans un deuxième temps, tenter de manoeuvrer lorsque la question du Sahara sera examinée en s’alliant au Mozambique et, éventuellement,  à la Russie.    

Cette attitude de prudence et de temporisation trouve également son explication dans les remous au sein de l’opinion publique algérienne à la suite du revers subi par la diplomatie algérienne dans sa tentative d'adhérer aux BRICS et l’obligation dans laquelle les autorités de ce pays  se sont trouvées de rétablir les relations avec l’Espagne sans sollicitation ni contrepartie sur le dossier du Sahara.

 

Enfin, le polisario a préféré ne pas critiquer ouvertement et frontalement la résolution  et s’est contenté “d’exprimer sa gratitude à tous les pays qui soutiennent le droit du peuple du Sahara occidental à l'autodétermination et au processus de décolonisation” ; il a en même temps “dénoncé le silence continu du Conseil de sécurité et de certains de ses membres quant aux sérieuses conséquences engendrées par la violation par les forces  marocaines du cessez-le-feu en 2020, ce qui entrave le processus politique de paix et les efforts de l'Envoyé personnel du Secrétaire général de l'ONU pour le Sahara visant à instaurer la paix et la sécurité dans toute la région".

Dans quelle mesure cette résolution pourrait faire remuer les sables mouvants de ce différend ? Quelles conclusions le Maroc et le Conseil de sécurité pourraient-ils tirer de l’attaque inédite du 28 octobre contre Smara et de quelle capacité de nuisance l’Algérie  dispose-t-elle pour influer sur le cours du processus politique concernant le Sahara. Une chose est certaine, l'Algérie sera directement exposée si elle n’agit pas comme un membre responsable du Conseil en refusant, par exemple, de participer aux tables rondes, de s’impliquer plus en avant dans les négociations ou de donner suite à la demande de recensement. Il appartiendra au Maroc de mettre l'Algérie devant ses responsabilités de membre du Conseil qui représente les intérêts de l’Afrique et particulièrement de l’Afrique du Nord sur le quota duquel elle a été élue.

Une fois au Conseil, l'Algérie s’activera pour essayer d’asseoir son leadership sur les deux autres membres africains sous couvert de coordination et de transposition des priorités et stratégies de l’Union africaine dans l’agenda du Conseil. Elle s’efforcera de jouer sur le chapitre de la coopération entre l’ONU et l’Union africaine et plus particulièrement entre les conseils de sécurité des deux instances pour revitaliser le rôle du Conseil paix et sécurité africain dans le traitement de la question du Sahara.

Entre-temps, le polisario a procédé trois jours avant le vote de la résolution 2703 à une opération inédite qui a visé la ville de Smara et qui a été suivie par des tirs de roquettes lancés depuis la zone tampon et qui auraient ciblé un site de la MINURSO, près de l’aéroport de Smara,  sans faire de victimes. Le polisario a fait coïncider cette seconde opération avec la célébration par le Maroc du 48ème anniversaire de la Marche verte.

 Pour mettre la lumière sur ces actes et déterminer leur nature et la responsabilité qui en découle,  le Procureur général du Roi près la Cour d’appel de Laâyoune a annoncé le 29 octobre le  lancement d’une enquête confiée à la police judiciaire compétente. Le même jour,  une délégation conduite par l’Inspecteur général des Forces armées royales (FAR), s’est rendue en Mauritanie pour la tenue de la 4ème réunion de la Commission militaire mixte maroco-mauritanienne  dont le communiqué final souligne la nécessité de consolider l’échange d’expérience et d’expertise entre les deux forces armées et contribuer ainsi à la sécurité et la stabilité dans la région”.

Il est possible que ce déplacement ait permis de recueillir des éléments d’informations et des indications sur les tirs de roquettes du polisario. Le fait que ce déplacement ait été suivi   , deux semaines plus tard, par l'arrivée d’une délégation algérienne à Nouakchott  dans le but de “renforcer les relations bilatérales entre les deux pays frères” suscite des interrogations sur l’origine de ces attaques et les possibles divergences au sein de la hiérarchie militaire algérienne quant à la liberté d’action du polisario pour les mener.  

Une fois les enquêtes accomplies, les autorités marocaines ne manqueront pas de tirer les conclusions qui s’imposent et en informeront le Secrétaire général de l’Onu, son Envoyé personnel et les membres du Conseil de sécurité. Mais d’ores et déjà, le Ministre marocain des Affaires étrangères a tenu à préciser le 15 novembre devant le Parlement que“le Maroc n'était pas dans l’escalade, mais plutôt pour  agir avec sagesse et détermination et qu’il déterminera quand et comment il sera répondu aux attaques terroristes contre la ville de Smara

La parenté de ces actes a été revendiquée par le polisario à travers son représentant à New york le 30 octobre, son représentant à Bruxelles qui a évoqué le même jour ce qu’il a qualifié de   “dommages collatéraux” et dans le « communiqué militaire 901 » faisant état d’attaques ….dans les secteurs de Mahbes, Es-Smara et Farsia ».

En ciblant  des civils innocents, le polisario a commis un acte terroriste qui met en jeu non seulement sa responsabilité mais aussi l’État dont le territoire a servi pour la préparation et le lancement de cet acte dirigé contre une partie du  territoire marocain et ses  habitants. Les appels au polisario pour revenir au cessez-le-feu se sont avérés, jusqu'à présent, sans effet.Il est temps pour le Conseil pour l’y contraindre en en faisant une condition préalable à toute reprise du processus.

Au-delà de ces incidents, et nonobstant la constance avec laquelle le Conseil maintient  les paramètres de la solution politique, y compris la prééminence du Plan d’autonomie marocain, les questions qui se posent sont  celles de savoir jusqu'à quand le statu quo sera-t-il maintenu, jusqu'à quand l'Algérie continuera-t-elle à berner le Conseil en esquivant ses responsabilités et jusqu'à quand le nombre des réfugiés, clef de tout ce problème et de son dénouement, restera-il une inconnue ?

Au moment où l'initiative d’autonomie gagne en appuis et en visibilité, il serait peut-être utile d’entreprendre une campagne destinée à mieux faire connaître son étendue, son bien-fondé pour la société de la région du Sahara et sa double dimension démocratique et humaniste. En même temps, avec l'entrée de l'Algérie au Conseil, une insistance sur le plan diplomatique bilatéral et multilatéral concernant le recensement pourrait contribuer à neutraliser l’activisme de ce pays durant les deux années de son mandat. 

 

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