Publications /
Opinion

Back
Après l’Angola, le Zimbabwe et l’Afrique du Sud, l’Ethiopie
Authors
February 16, 2018

Lorsqu’en novembre dernier j’avais intitulé mon blog sur Zuma et Mugabe « Mugabe tombe, Zuma vacille », j’avais tracé un parallèle entre la situation des deux hommes. Ils voulaient tous les deux confier le pouvoir à leurs compagnes au détriment de leurs vice-présidents. Aujourd’hui, la similitude continue de se confirmer : Zuma vacillant après la chute de Mugabe, finit par démissionner lui aussi et donc tomber. Les deux anciens vice-présidents sont aujourd’hui des présidents en exercice momentanément, en attendant les prochaines élections. Les cas sud-africain et zimbabwéen peuvent quasiment se calquer l’un sur l’autre. C’est d’ailleurs en apprenant sur le cas du Zimbabwe que j’ai pu dessiner de manière quasi juste la suite des évènements en Afrique du sud dans mon Policy Brief intitulé « Ramaphosa à la tête de l’ANC, une cohabitation qui ne dit pas son nom ». Si les chutes des deux hommes se ressemblent, elles ne constituent pas le seul modèle de fin de règne dans ce qui semble être les prémisses d’un « printemps africain », même si les évènements se passent plutôt en plein hiver. 

En effet d’autres hommes politiques en Afrique se sont également résignés à quitter les arcanes du pouvoir, pour différentes raisons : 

- Soit ils ont été poussés par le réveil d’une population dont le sommeil cauchemardesque n’avait que trop duré : c’est le cas du premier ministre éthiopien qui a présenté sa démission le 15 Février 2018, déclarant que sa démission était «inévitable pour permettre de mener des réformes qui établiront une paix durable et la démocratie»

- Soit ils ont enfin compris que leur longévité au pouvoir ne pouvait se transformer en éternité : le cas s’applique bien à l’ancien président angolais Dos Santos qui dès septembre 2017, avait cédé le pouvoir après 38 ans de règne. 

Quatre têtes sont ainsi tombées en cinq mois : Dos Santos, Mugabe, Zuma et Hailemariam. Soit autant que le printemps arabe, avec Ben Ali, Moubarak, Kadhafi et Abdallah Salah. Qu’ont en commun ces leaders africains qui viennent de tomber? Mugabe, Zuma et Dos Santos partent, mais leurs formations politiques respectives perdurent. Elles promettent pourtant toutes de procéder à des réformes. Il n’est pas certain que ces formations doivent muter pour survivre. Quid De Hailemariam et du Front Démocratique Révolutionnaire des Peuples Ethiopiens (EPRDF), qui est la coalition au pouvoir, composée de quatre partis ? La coalition subsistera-t-elle à la tornade ? Saura-t-elle muter pour survivre ? Rien n’est moins sûr tant la situation Ethiopienne est plus complexe que les autres et marquée par une double dynamique. La première s’exprime par des protestations de la rue contre les gouvernants, c’est-à-dire  contre l’EPRDF pris dans son entièreté comme un ensemble cohérent et solidaire. 

La seconde prend la forme d’une lutte à l’intérieur de la coalition entre d’un côté, l’Organisation Démocratique des peuples Oromo (ODPO), et le Mouvement démocratique national Amhara (ANDM), lassés de la domination tigréenne, et de l’autre le Front de Libération du Peuple du Tigray (le TPLF). Il reste à savoir si le mouvement de protestation populaire initié depuis 2015 est provoqué par les deux partis (OPDO et ANDM), ou s’il est spontané et que les deux formations ne font que l’instrumentaliser pour rééquilibrer, voire renverser, le rapport de force au sein de la coalition. Ce qui semble sûr c’est que les leaders amhara et oromo intensifient la pression pour occuper plus d’espace au sein de l’EPRDF. Les vents leurs sont favorables aussi bien dans la dimension interne avec les protestations populaires, que dans la dimension régionale avec les mutations qui s’opèrent dans un grand nombre de partis dominant en Afrique (l’union Nationale Africaine du Zimbabwe-Front Patriotique, le Congrès National Africain ou le Mouvement Populaire de Libération de l’Angola). La démission du premier ministre pourrait donc s’inscrire dans ce cadre.

Dans tous les cas les arcanes des pouvoirs africains voient s’entamer un mouvement qui rappelle aux inconditionnels du pouvoir long et sans alternance (qu’ils soient des personnalités ou des structures politiques) que le moment est au changement sous peine de disparition. Les nouvelles générations veulent mener la lutte pour prendre en main leur destinées, les anciennes qui ont lutté pour les indépendances doivent passer la main.
 

RELATED CONTENT

  • Authors
    Eduardo de Carvalho Andrade
    July 31, 2024
    This paper was originally published in Project Syndicate   Fourteen high-income countries have shown how immigration can help offset declining fertility rates and maintain population levels. But with anti-immigrant sentiment on the rise, politicians in these countries face a difficult choice: welcoming foreigners or facing the economic challenges brought about by an aging population. WASHINGTON, DC – Populations around the world are aging, as mortality and fertility rates fall. Wh ...
  • July 26, 2024
    Avec un chiffre d’Affaires en hausse de 50 % par rapport à 2022, l’industrie pharmaceutique au Maroc a connu une année record en 2023. Cette étude est consacrée à l’une des trois composantes de ce secteur :la composante industrielle. Elle regroupe 50 Établissements pharmaceutiques industriels (EPI). (Source : la Direction des médicaments et de la pharmacie (DMP). L’analyse de chacun de ces EPI met en évidence un écosystème, amorcé dès 1933 avec la création de Pharma-Coo ...
  • Authors
    Policy Center for the New South
    July 26, 2024
    The Atlantic region is grappling with a host of challenges that require urgent attention. Economic and financial struggles, social unrest, and political changes are transforming the geopolitical landscape of the region. Issues including unemployment, poverty, violence, extremism, climate change, and migration are becoming more pressing, making it essential to find lasting solutions. In this context, it is crucial to create inclusive discussions between different generations and regi ...
  • Authors
    July 26, 2024
    This paper was originally published in idos-research.de   The early 1960s can be regarded as the “Big Bang” for international cooperation and development policy. The US was pushing an international system to support developing countries, and in 1961, it established the US Agency for International Development (USAID). The same year saw the Organisation for Economic Co-operation and Development (OECD) set up its Development Assistance Committee (DAC). Germany’s post-WWII engagement ...
  • Authors
    Nizar Messari
    July 26, 2024
    Venezuela holds crucial presidential elections on July 28. The results might substantially alter the political system in that country, since, for the first time since 1998, the opposition candidate has a clear chance of winning the vote. Why has the opposition been unable to win elections in that country for almost three decades now? And why is it on the verge of winning elections this time? What is the international dimension of this electoral process? How might it impact Morocco? ...
  • July 25, 2024
    In today's episode, we turn our focus to the economic landscape of sub-Saharan Africa, a region grappling with significant challenges and opportunities as it strives for recovery. According to the latest IMF economic outlook for sub-Saharan Africa, the region has faced diverse economic ...
  • July 25, 2024
    This event is organized by the Green Investment Principles (GIP) Africa Chapter, co-chaired by Bank of Africa and Ninety One, in partnership with the Policy Center for the New South (PCNS). The GIP Africa Chapter, established during COP27 in Egypt, is one of the regional chapters of the...
  • Authors
    Nizar Messari
    July 24, 2024
    In January 2024, gunmen invaded a TV studio in Ecuador, seized journalists and staff as hostages, and interrupted the regular programs. That episode highlighted the rise of violence in Ecuador, a country that was until very recently calm and peaceful. In this paper, I place the rise of violence in Ecuador within the context of what some refer to as the endemic violence in Latin America. I explore its risks, consequences, and the ways it could be tackled. I also emphasize some of the ...
  • Authors
    Pierre Jacquemot
    July 23, 2024
    Le rôle du secteur halieutique dans l’alimentation du continent africain est considérable : 22 % des protéines animales disponibles viennent des produits de la mer et des eaux douces et plus de 50 % dans certains pays africains, en particulier en Afrique du Nord et de l’Ouest. Les pêches et leurs activités connexes fournissent non seulement de la nourriture, mais aussi des emplois à 12 millions de personnes, et génèrent des revenus pour les États comme pour les communautés ...