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Accessibilité des femmes aux opportunités économiques au Maroc
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March 29, 2023

Le taux d’activité des femmes marocaines (*) affiche un déclin devenu structurel depuis une vingtaine d’années. Ce déclin est encore plus critique vu le faible niveau de ce taux, considéré parmi les plus bas à l’échelle mondiale. Pourtant, plusieurs réformes, programmes et actions ont été menés ou sont en cours de déploiement pour améliorer les conditions de la femme, aussi bien au niveau économique que social, et dans les milieux urbain et rural.

Sommes-nous face à un phénomène sociétal ou tout simplement devant des problématiques de croissance économique ? Quels enseignements peut-on tirer des différentes études et analyses menées dans ce sens et quels sont les leviers pour une politique plus efficiente qui produit des effets durables pour l’amélioration de l’autonomisation économique de la femme au Maroc ?

(*) Le taux d’activité indique la part de la population qui participe ou cherche à participer à la production de biens et services dans la population totale du pays.

INTRODUCTION

Les questions liées aux droits des femmes, particulièrement celles relatives à l’égalité d’accès aux opportunités économiques (emploi décent, salaire, entrepreneuriat, position dirigeante, actif productif, éducation/formation,...), restent des préoccupations posées dans notre société. À l’ère des transformations socio-économiques et des bouleversements technologiques, les avancées réalisées jusqu’à présent n’ont pas permis de réduire les écarts enregistrés par rapport aux Objectifs de développement durable (ODD), notamment ceux relatifs à l’autonomisation des femmes. Effectivement, en 2022, selon les statistiques du Haut-Commissariat au Plan (HCP), ce taux d’activité a été de 19,8 % pour les femmes, avec une baisse cumulée de près de 30 % de 2004 à 2022. Dans le même sens, selon le classement de « Global Gender Gap Report, 2022 », le Maroc se classe à la 139ème position sur un total de 146 pays pour le volet participation et opportunité économique.

Plusieurs études et analyses ont considéré que cette régression trouve ses origines essentiellement dans le faible niveau de scolarité des femmes, les inégalités territoriales, les conditions économiques familiales, le cadre légal et règlementaire ainsi que les stéréotypes qui persistent dans notre société.

Néanmoins, toutes les initiatives identifiées et engagées en se basant sur ces diagnostics, notamment à travers les programmes et les politiques publiques, n’ont pas produit d’avancées très significatives, au point d’appréhender chaque année l’annonce des statistiques officielles du taux d’activité des femmes au Maroc.

Est-ce que nous sommes face à une problématique d’échelle temporelle où les effets positifs générés par les différentes initiatives ne seraient mesurables qu’à moyen, voire long terme ? Ou bien est-ce que les politiques et les programmes mis en place ne produisent pas suffisamment d’effets permettant d’inverser cette tendance baissière ?

Le Programme National Intégré d’Autonomisation Économique des Femmes à l’horizon 2030 a, entre autres, mis en exergue les mises en synergie des programmes par les différentes parties prenantes, la vision intégrée, la consolidation qui sont, certes, des approches qui peuvent apporter de l’amélioration, mais pas de remèdes efficaces à des maux profondément installés.

Il faut reconnaitre que le contexte économique, qui a été marqué par plusieurs conjonctures difficiles ces vingt dernières années (particulièrement la crise financière et la COVID-19), a certainement accentué les vulnérabilités en termes d’accessibilité des femmes aux opportunités économiques. De ce fait, les approches et les programmes en faveur de l’autonomisation de la femme ont besoin d’être réexaminés et réajustés pour rompre les équilibres malsains installés et identifier les voies de croissance, en apportant plus de proximité et de connexion avec les réalités de chaque territoire et de chaque segment des catégories socio-économiques des femmes.

Par ailleurs, les nouvelles mutations économiques, les transitions démographiques et technologiques, ainsi que les évolutions des modes de vie et de consommation en perspective, même si elles sont porteuses d’opportunités, présentent de nouveaux défis nécessitant leur prise en considération, afin d’en tirer un meilleur profit.

Les mouvements féministes marocains ont joué un rôle important dans l’amélioration des conditions de la femme au Maroc. Leur lutte pour les droits économiques de la femme a besoin d’une mobilisation plus forte des parties prenantes et d’une implication élargie aux jeunes, pour apporter des solutions nouvelles et plus viables à l’autonomisation de la femme marocaine.

Le Discours royal du 30 juillet 2022, à l’occasion de la célébration du 23ème anniversaire de l›accession de Sa Majesté le Roi au Trône, a mis l’accent sur le rôle de la femme marocaine qui doit apporter son plein concours dans tous les domaines, pour que le Maroc continue de progresser. Les femmes doivent occuper la place qui leur échoit et apporter leur concours à toutes les filières de développement.

APPRÉCIATION DE L’ÉVOLUTION DU TAUX D’ACTIVITÉ DE LA FEMME SELON DIFFÉRENTS FACTEURS

Depuis ces deux dernières décennies, le taux d’activité des femmes au Maroc publié par le HCP révèle une baisse devenue structurelle attribuant actuellement le caractère d’activité à moins de 20 % de femmes âgées de plus de 15 ans et considérant près de 80 % des femmes comme non actives. Comparé à l’évolution du taux d’activité masculin, nous constatons quasiment la même tendance à la baisse, avec un écart qui se maintient entre le taux d’activité masculin et féminin à un niveau de presque 50 points en pourcentage.

Figure 1

Pour déterminer les facteurs impactant le taux d’activité des femmes, l’analyse portera essentiellement sur les quatre facteurs suivants: l’âge, le niveau de scolarité, le milieu et le statut.

Si l’on fait une analyse par catégorie d’âge, nous constatons que le taux d’activité pour les tranches {25-34 ans}, {35-44 ans} et {45-59ans} est supérieur au taux global moyen, même s’il connait la même décroissance. À signaler que les tranches d’âge [15 à 24 ans] et [45 à 59 ans] sont celles qui ont subi le plus cette baisse.

Figure 2

Pour ce qui est de la régression constatée pour la tranche 15-24 ans, elle peut être expliquée par l’amélioration du niveau de scolarité des jeunes filles. En effet, selon le HCP, le taux de scolarisation des 15-17 ans est passé de 46,3 % en 2010 à 70,9 % en 2020. De même, la structure de la population âgée de 15 ans et plus, selon le niveau de diplôme, démontre une nette amélioration du niveau de scolarité ces dix dernières années, même si la part des femmes non diplômées reste prédominante.

Figure 3

Par ailleurs, le taux d’activité des femmes âgées de plus de 60 ans est appelé à connaitre une baisse continue en raison de l’amélioration de l’espérance de vie à la naissance. En effet, le nombre de femmes dont l’âge est supérieur à 60 ans est évalué à 2 176 000 en 2021 ; alors qu’en 2004, cette population n’était que de 1 258 000, ce qui soulève d’autres défis en termes de protection et de sécurité sociales.

Figure 4

Tenant compte de ces éléments, l’analyse du taux d’activité de la femme devrait porter l’attention à la catégorie des 25-59 ans pour soustraire les effets induits par l‘amélioration du niveau de scolarité et de l’espérance de vie et cerner les facteurs à effets directs sur l’activité des femmes.

Une analyse par milieu révèle les constats suivants :

  • globalement, le taux d’activité des femmes en milieu rural est relativement plus élevé qu’en milieu urbain ;
  • en milieu urbain, le taux d’activité des femmes s’est amélioré durant les 10 dernières années pour les tranches des 25-59 ans, tandis qu’une régression relativement importante est constatée au niveau rural ;
  • comparé au taux d’activité des hommes, pour ces mêmes tranches, nous constatons une régression en milieu urbain et une presque stabilisation en milieu rural.

 

 

Figure 5

Par ailleurs, le niveau d’études de la femme est un facteur impactant son taux d’activité. Les femmes diplômées de l’enseignement supérieur affichent le meilleur taux d’activité. Néanmoins, l’amélioration du niveau de scolarité des femmes ne favorise pas forcément la progression de ce taux d’activité. En effet, entre 2001 et 2021, ce taux s’est dégradé de 14 points de pourcentage pour les diplômées du niveau supérieur, tandis que le taux d’activité des diplômées du niveau moyen et des non-diplômées a régressé respectivement de 7 et de 5 points de pourcentage.

 

Figure 6

Cette tendance est confirmée par l’augmentation du taux de chômage au niveau des diplômées de l’enseignement supérieur qui dépasse 30 % en milieu urbain et 45 % en milieu rural.

 

Figure 7

Même si le milieu rural semble offrir un meilleur accès au marché du travail pour les non diplômées et celles ayant un niveau primaire, ce marché reste très volatile et à faible revenu.

Figure 8

Le quatrième facteur qui semble déterminant dans l’activité de la femme est lié à son statut. Contrairement aux hommes, dont le taux d’activité augmente après le mariage, l’accessibilité des femmes aux opportunités économiques est réduite de plus de 50 % une fois mariées.

Figure 9

En milieu rural, pour les femmes âgées de plus de 15 ans, la tendance à la baisse du taux d’activité est enregistrée indépendamment du statut de la femme. Néanmoins, il est remarqué une baisse plus importante pour les célibataires qui, avec l’urbanisation et l’amélioration de la scolarité, seraient en mobilité ou s’adresseraient aux marchés du travail en milieu urbain.

Les taux d’activité des femmes, selon leur statut, en milieu urbain, sont restés les mêmes ces dix dernières années, avec une importance marquée du taux d’activité des divorcées, suivies des célibataires.


Figure 10

L’AUTONOMISATION DE LA FEMME DANS UN CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET SOCIAL NON TOUJOURS FAVORABLE

Selon les données de 2021, le nombre de femmes âgées de 25 à 59 ans est évalué à près de 2 652 000 en milieu rural, contre 5 921 000 en milieu urbain. Ainsi, malgré la faiblesse du taux d’activité en milieu urbain, la population active urbaine reste plus élevée. Dans le même sens, entre 2000 et 2018, le nombre de femmes employées a augmenté de 347 000 en milieu urbain, contre uniquement 69 000 en milieu rural, pour cette même tranche d’âge.

Toutefois, le taux de féminisation de l’emploi se situe à des niveaux très faibles : 20,5 % pour les salariés, 10,8 % pour les indépendants, 9% pour les employeurs, 10,6 % pour les apprentis et 9,1 % pour les membres des coopératives (source HCP). Les aides familiales représentent le taux le plus élevé, 57,7 %.

Le marché du travail rémunéré et d’entrepreneuriat reste ainsi très limité, particulièrement en milieu rural où il y a un manque d’opportunités, qui restent volatiles et à faibles revenus.

L’économie sociale et solidaire a joué un rôle important dans le développement des territoires et la restructuration de nouvelles filières (agriculture, artisanat, produits du terroir ... etc). Plus de 42 000 femmes sont adhérentes à des coopératives, Le nombre de coopératives féminines a atteint 4524 en 2019, certaines d’entre elles sont arrivées à se développer au niveau national et même à l’international, d’autres, par contre, sont restées au niveau de la subsistance, faute de moyens ou d’accompagnement.

L’entrepreneuriat reste un projet très complexe pour plusieurs femmes, en raison du manque de financement approprié, de garanties, de compétences ou de soutiens. L’entrepreneuriat informel est par ailleurs pratiqué par certaines d’entre elles par nécessité, pour assurer des revenus additionnels et couvrir les charges de leur famille, tout en bénéficiant de la flexibilité au travail et en exploitant leur savoir-faire (pâtisseries, produits traiteurs, couture et broderie, commerce,...).

Par ailleurs, l’insécurité de l’emploi touche davantage les femmes que les hommes. En effet, celles-ci ont été plus nombreuses à être employées en contrats de courte durée. Les salaires moyens restent plus faibles comparés à ceux des hommes. En 2020, selon les données de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), 86 % des femmes ont reçu un salaire inférieur au SMAG contre 65 % pour les hommes dans le secteur agricole. De même, le salaire mensuel moyen des femmes est de 4737 DH contre 5349 DH pour les hommes.

Très souvent, les freins sociétaux, les stéréotypes et la non scolarisation sont répertoriés parmi les obstacles majeurs à l’accessibilité de la femme aux opportunités économiques. Ce constat est vrai, mais ne tient pas compte d’autres facteurs qui semblent être tout aussi déterminants. Si l’on porte l’analyse sur la tranche des 25-59 ans, on constate que le taux d’activité des femmes progresse en milieu urbain, mais à un niveau relativement faible, ne permettant pas de compenser la baisse relevée en milieu rural (figure 5).

Le développement du marché du travail et la croissance économique sont les vrais leviers pour apporter des améliorations substantielles au taux d’activité des femmes.

En effet, le maintien durant ces vingt dernières années, d’une part, du même gap entre les taux d’activité masculin et féminin de près de 50 points en pourcentage (figure1) et, d’autre part, la même tendance à la baisse pour les deux genres, trouve son explication dans l’étroitesse du marché de l’emploi qui ne génère pas suffisamment d’opportunités permettant d’absorber les stocks constitués en demandeurs d’emplois ainsi que les nouveaux venus au marché du travail.

La dernière note d’information publiée par le HCP, relative aux principales caractéristiques de la population active, indique que la population en âge de travailler a connu une hausse en moyenne de près de 400.000 personnes, alors que l’économie a créé en moyenne 121.000 postes au cours des trois dernières années qui précèdent la crise sanitaire liée à la COVID-19 et elle a perdu 432.000 postes d’emploi en 2020 pour ensuite créer 230.000 postes d’emploi en 2021 et perdre 24000 emplois en 2022.

Figure 11

Ce même constat explique le niveau élevé du taux de chômage pour les diplômées des études supérieures qui, malgré l’amélioration de leur niveau de scolarité, plus du tiers d’entre elles se retrouvent au chômage, essentiellement en raison du manque d’offres dans le marché du travail (figure7). Ce taux de chômage mérite d’être analysé par âge, spécialité, ville et région, pour identifier s’il s’agit de problématiques d’adaptation de l’offre à la demande, ou bien de manque d’opportunités.

Les jeunes filles ayant suivi des études supérieures en dehors de leur ville ou village d’origine, une fois le diplôme obtenu sont contraintes de retourner au foyer familial, si elles ne trouvent pas de travail rapidement. Très souvent, elles sont découragées et abandonnent leur recherche d’emploi, vu le manque d’opportunités correspondant à leurs attentes dans leur lieu de résidence, en termes de rémunération, de sécurité et de mobilité.

Par ailleurs, près de 54 % des femmes sont au foyer et sont de ce fait considérées non actives.

Une grande majorité de ces femmes est confrontée au manque d’opportunités économiques correspondant à leur niveau de qualification ou répondant à leurs attentes en termes de rémunération, de flexibilité, de mobilité ou de sécurité.

Le fait que plus de 50 % des femmes dont l’âge est supérieur à 15 ans, n’aient aucun niveau scolaire, renseigne sur le chemin qui reste à parcourir (figure3).

Nombreuses sont celles parmi ces femmes qui ont choisi de ne pas exercer d’activités en dehors de leur foyer, pour des raisons purement économiques, surtout quand les salaires proposés ne leur permettent pas de couvrir les charges additionnelles générées par leur activité en dehors du foyer, à savoir les frais de transport, les services de ménage à domicile,...etc

Mais, parmi les femmes au foyer, il y a aussi celles qui n’ont pas été en mesure de choisir. Indépendamment de leur statut et de leur niveau d’éducation, elles ont été forcées par leur mari ou un membre de leur famille à ne pas travailler. La part de ces femmes au foyer varierait entre 10 % et 23 %, selon les études menées dans ce sens par ONU Femmes et la Banque mondiale (BM).

QUELS POLITIQUE ET PROGRAMMES POUR RÉDUIRE LES ÉCARTS ?

Le gouvernement s’est fixé comme objectif de faire évoluer le taux d’activité des femmes de 20 % à 30 % d’ici 2026. Cette progression projetée, qui est totalement en rupture avec la tendance baissière installée depuis deux décennies, nécessitera des mesures qui produisent des effets exceptionnels.

Produire de l’impact à ce niveau et de manière durable en 4 ou 5 ans reste un objectif très ambitieux. La politique de ciblage s’impose pour répondre aux vrais besoins et apporter des réponses adaptées à chaque catégorie socioéconomique des femmes marocaines, en fonction des quatre facteurs analysés à savoir: l’âge, l’éducation, le statut matrimonial et le milieu/région.

De ce fait, le taux de 30 % visé devrait être décliné en sous-objectifs par catégorie et par territoire, pour identifier l’effort additionnel à mener par l’ensemble des parties prenantes (pouvoirs publics, secteur privé et société civile) ainsi que les actions à mettre en place pour y parvenir, selon l’échéancier fixé.

Il a bien été démontré que ces actions devraient réserver des programmes spécifiques aux femmes dont les tranches d’âge sont entre 25 ans et 59 ans, vu que la croissance recherchée proviendrait de ces segments qui présentent un fort potentiel et en même temps un grand déficit.

La conjoncture économique globale due au contexte de la pandémie de la COVID-19, accentuée par les effets du conflit Ukraine-Russie, a impacté notre économie ces dernières années et s’est traduite par l’étroitesse du marché du travail et la baisse des opportunités économiques aussi bien pour les hommes que pour les femmes.

Par ailleurs, malgré les efforts menés en matière d’investissements et d’infrastructures, les politiques sectorielles volontaristes mises en place et l’amélioration de l’environnement des affaires, la diversification de notre économie reste une préoccupation prioritaire pour générer plus d’opportunités d’emplois et plus de croissance à l’ensemble des territoires.

Des analyses empiriques démontrent que le taux d’activité des femmes évolue, en fonction du niveau de développement du pays. La théorie de la forme U soutient qu’à mesure que les pays se développent économiquement, il est constaté en général une régression du taux d’activité des femmes qui par la suite connait une reprise, suite à l’urbanisation et la diversification de l’économie.

Il est certain que l’amélioration de la valeur ajoutée des secteurs, tels que l’industrie, l’agriculture et le tourisme ainsi que les services qui leur sont associés, est génératrice de grandes opportunités, si l’on prend en considération le potentiel de l’intégration industrielle au niveau de plusieurs secteurs d’activité en développement (Énergie, mobilité, santé, eau, environnement..), la valorisation et la transformation des produits agricoles au niveau rural, notamment par les TPE et PME, la structuration des filières touristiques au Maroc et le développement des services numériques.

Un ensemble de mesures sont déjà lancées par les pouvoirs publics, portant sur l’amélioration du cadre juridique et règlementaire pour assurer un environnement favorable à l’autonomisation de la femme, avec la mise en place de programmes de formation et d’appui à l’entrepreneuriat féminin et solidaire. D’autres actions sont également initiées par le secteur privé et la société civile pour, entre autres, promouvoir l’égalité professionnelle, améliorer le niveau de participation et de représentation et développer le leadership féminin.

Ces programmes peuvent générer plus d’impact s’ils prennent en considération les complexités du marché du travail et de l’entrepreneuriat, spécifiques à chaque territoire qui diffèrent d’une catégorie socio-économique à une autre. A titre d’exemple, les programmes d’accompagnement pour les coopératives en milieu rural ont démontré leur pertinence, mais leur viabilité et leur développement nécessitent que ces coopératives intègrent des chaînes de valeur de production ou de distribution compétitives, avec l’implication d’autres acteurs (industriels ou distributeurs) pour leur garantir l’accessibilité aux marchés, faire grandir les opportunités et faciliter leur arrimage à l’économie.

A cet effet, la mise en place d’un cadre incitatif pour attirer de nouveaux acteurs au niveau de la supply chain avec des objectifs d’intégration et d’accompagnement à l’échelle des territoires, ciblant, entre autres, les coopératives féminines, peut constituer un des leviers à effets multiples sur la création d’emploi et l’amélioration de la valeur ajoutée.

Dans le même sens, les projets accompagnés en milieu rural sont généralement orientés vers les coopératives, ce qui ne couvre pas toutes les catégories socio-économiques. Pour encourager l’entrepreneuriat féminin dans des secteurs de transformation et de valorisation agricole, en milieux rural et péri-urbain, il y a lieu de mettre en place des programmes spécifiques adaptés, en termes de financement, d’accompagnement et d’accessibilité à des services appropriés.

Le taux de chômage relativement élevé des diplômées de l’enseignement supérieur mérite une attention particulière, il génère une double déperdition pour notre pays, en termes de coût de formation et de contribution à l’économie, sachant que le nombre des filles diplômées des études supérieures est en constante augmentation et que plusieurs d’entre elles ont les meilleurs scores de leur promotion.

Ce taux trouve son explication dans deux raisons fondamentales. La première concerne les deux genres, elle peut être liée au manque d’offres en emploi ou à l’adaptation de la formation aux besoins du marché. La seconde est, par contre, plus spécifique aux jeunes filles et nécessite d’associer le développement des compétences à une croissance plus inclusive, à travers des programmes nationaux et régionaux permettant à ces jeunes filles d’avoir un meilleur accès aux opportunités économiques. Des mécanismes de suivi et d’accompagnement à l’insertion de ces lauréates doivent être mis en place pour réduire les freins identifiés, tels que ceux liés à la mobilité, l’accès à l’information et au manque d’orientation et de conseil.

Les nouvelles technologies présentent des opportunités qui devraient produire des effets positifs pour l’autonomisation de la femme, en intégrant la perspective de genre afin de ne pas créer de nouvelles sources d’inégalités.

En effet, les technologies numériques offrent un espace de création et de développement qui permet à plusieurs femmes de travailler en ligne, soit dans le domaine du salariat ou de l’entrepreneuriat. Des programmes spécifiques sont nécessaires pour accompagner et offrir le cadre approprié aux femmes qui se lancent dans l’entrepreneuriat numérique, à défaut nous constatons l’émergence de l’informel numérique qui d’ailleurs n’est pas exclusif aux femmes.

Les réseaux sociaux peuvent ainsi être utilisés pour connecter les femmes à des communautés de soutien et à des opportunités économiques, mais il y a lieu de lutter contre la cyberintimidation, la désinformation et les préjugés du genre en ligne. Selon le HCP, l’usage des NTIC (Nouvelles technologies de l’information et de la communication) contribue à hauteur de 19 % à la violence à l’encontre des femmes. Cette contribution s’élève à 34 % pour les filles âgées de 15 à 19 ans et à 28 % pour les femmes âgées de 20 à 24 ans.

Par ailleurs, le travail à distance sera certainement de plus en plus développé, ce qui pourrait offrir plus de flexibilité aux travailleuses, selon leur besoin. Toutefois, ce cadre, dans la durée, ne leur permet pas de garder la même qualité d’échange et de connexion avec leurs collègues et peut affecter leur évolution de carrière.

Ainsi, les possibilités pour renforcer l’accessibilité des femmes aux opportunités économiques sont multiples, elles doivent s’inscrire dans une évolution dynamique qui tient compte des facteurs impactant le plus leurs activités et qui prend en charge la diversité de leurs besoins et de leurs contraintes.


BIBLIOGRAPHIE

  • https://www3.weforum.org/docs/WEF_GGGR_2022.pdf.

  • Le Programme National Intégré d’Autonomisation Économique des Femmes et des Filles, à l’horizon 2030 (https://social.gov.ma/wp-content/uploads/2021/05/TAMKINE- fRAN9AIS-FINALImp.pdf).

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  • https://www.unwomen.org/sites/default/files/Headquarters/Attachments/Sections/ CSW/65/MS%20Inputs%20Review%20Theme/Morocco.pdf.

  • Gender inequality in the labor market: the case of Morocco; Otaviano Canuto-Hajar Kabbach; Policy brief,Policy Center for the New South; March 9, 2023.

  • USAID/Morocco Gender Analysis Final Report 2020, TALM/MRA Mobilising for Rights Associates. November 2020. Authors: Akerbib, R.; Bernard. D.L.; Bordat, S.W.; Jazouli, A.; Kouzzi, S.; and Mouline, F. Editors: Bernard, D.L., and Bordat, S.W.

  • La femme marocaine en chiffres, HCP , 2022.

  • https://www.hcp.ma/region-drta/attachment/861157/

  • https://www.hcp.ma/Esperance-de-vie-a-la-naissance-en-annees_a3497.html

  • https://www.cnss.ma/sites/default/files/files/Rapport%20statistique%20et%20 d%C3%A9mographique%202020%20Vf.pdf

  • Note d’information du Haut-Commissariat au Plan relative aux principales caractéristiques de la population active occupée en 2022.

  • Trends and Determinants of Female Labor Force Participation in Morocco An Initial Exploratory Analysis, Policy Research Working Paper 9591. Word Bank ; Poverty and Equity Global Practice March 2021.

  • Le mouvement coopératif féminin dans le milieu rural au Maroc : quelle contribution au développement humain ? Moroccan Journal of Entrepreneurship, Innovation and Management (MJEIM) ISSN : 2509-0429 Volume 5, numéro 1- Bouchra DEBBAGH& Fatima Zahra YOUSFI.

  • https://press.un.org/fr/2023/fem2224.doc.htm

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